Décret tertiaire
6 mai 2020
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arrêté décret tertiaire

Le Décret Tertiaire ou « rénovation tertiaire » paru à la date du 23 juillet 2019 et issu de la Loi Élan s’inscrit dans une démarche de transition énergétique. Il répond à un objectif de diminution des gaz à effet de serre émis par le secteur de l’immobilier en France.
Le décret indiquait que les bâtiments du tertiaire (commerces, bureaux, santé, enseignement, restauration) allaient être amenés à réduire leurs consommations énergétiques de façon considérable, et cela très prochainement. Depuis, le monde de l’immobilier attendait avec impatience la parution de l’arrêté tertiaire qui précise les modalités d’application, la méthodologie de calcul pour le suivi de la performance et l’atteinte des objectifs identifiés.
 
C’est maintenant chose faite, avec la parution de l’arrêté le 3 mai 2020.
Place au décryptage du décret !

 

 

La consommation de référence : le point de départ pour comparer sa performance aux objectifs fixés par le décret tertiaire

 

Le décret tertiaire ne donnait aucune indication concernant la référence de comparaison afin d’honorer les objectifs de réduction énergétique. L’arrêté du 10 avril 2020 présente la méthodologie à utiliser pour comparer sa performance énergétique sur un bâtiment ou un patrimoine aux objectifs de réduction à horizon 2030. Deux possibilités : ou se référer à une consommation surfacique absolue qui sera indiquée par secteur d’activité dans un futur arrêté, dit « arrêté tertiaire II » qui viendra compléter cet arrêté « Méthode » ou se référer à la consommation d’une année de référence qui sera basée sur l’historique du bâtiment ou du patrimoine étudié.
 
Pour identifier la période de référence et la consommation associée, l’arrêté préconise d’utiliser les factures d’énergie ou tout autre moyen approprié qui peut être équivalent. On pense ici aux données facturantes d’un gestionnaire de réseaux de distribution comme ENEDIS qui sont tout à fait pertinentes. On pourra imaginer également récupérer les relevés manuels réalisés par un mainteneur, pour cela il faut prendre en compte les erreurs potentielles qu’on leur connaît. Dans tous les cas, l’autorité administrative pourra demander des preuves pour justifier les consommations déclarées (exemple : scan de facture, fichier pdf, appel ENEDIS, etc…).
 
L’arrêté précisant le décret tertiaire explique que cette consommation de référence pourra remonter jusqu’à 2010, mais devra présenter 12 mois consécutifs. Un travail important de récupération et de qualification de données sera donc à respecter pour s’assurer de la complétude et de la cohérence de celles-ci. Pour les sites partiellement occupés, il sera possible de reconstruire la consommation globale avec des ratios.

 

La consommation absolue : un autre moyen de comparaison pour valider les objectifs du décret tertiaire

 

La définition des objectifs via un calcul lié à une valeur absolue, consiste à atteindre un seuil de consommation énergétique définie par la catégorie d’activité des bâtiments.
 
L’arrêté du 10 avril 2020 répond aux questionnements suscités par le décret tertiaire, concernant la prise en compte, par exemple des bâtiments récents qui ont peu de marge de manœuvre en termes d’amélioration de la performance énergétique. En effet, bien souvent construits suivant des réglementations contraignantes, ces bâtiments sont par nature performants, il faut donc pouvoir prendre en compte cet état de fait et ne pas leur demander des objectifs inatteignables.
 
En ce qui concerne la modulation de cette consommation en fonction de paramètres extérieurs, l’arrêté prévoit de décomposer la consommation absolue en 2 parties : une partie liée au traitement climatique (chauffage, rafraichissement, etc.) qui pourra être ajustée à la météo par exemple et une partie liée à l’usage spécifique du bâtiment et qui pourra être ajustée en prenant en compte l’intensité d’usage.

 

Décret tertiaire et ajustement de la consommation d’énergie aux conditions climatiques extérieures : une méthodologie qui aurait pu être plus précise…

 

La prise en compte de la météo sera réalisée à partir des données des stations météo France et les Degrés jours unifiés seront utilisés comme habituellement dans la profession.
 
Toutefois, l’ajustement de la consommation aux conditions climatiques extérieures ne se fera qu’avec une classique règle de 3 lorsqu’il est possible d’identifier les consommations de chauffage ou de rafraichissement (compteur dédié, sous-comptage présent sur le site, etc.). Cet ajustement aurait pu être plus précis en se basant sur la méthodologie IPMVP mais l’administration a préféré une méthodologie plus simple et accessible à tous, même si cela doit se faire avec quelques simplifications.
 
Plus étonnant, lorsque les parts de chauffage et de rafraichissement ne sont pas connus (pas de compteurs dédiés, ni de sous-compteurs), l’ajustement pourra être réalisé à partir d’un ratio lié aux surfaces pour le chauffage (0,03 kWh/m²/DJU) et un ratio des surfaces utilisées pour le refroidissement (0,05 kWh/m²/DJU). Cette simplification ne prend malheureusement pas en compte la façon dont on produit le chauffage ou le rafraichissement, et il est certain, par exemple, que des disparités vont apparaître sur un patrimoine immobilier entre les sites chauffés avec des résistances électriques et des sites chauffés avec des pompes à chaleur.
 

Du temps pour moduler ses objectifs et s’assurer d’un plan d’action pertinent afin de répondre au décret tertiaire

 
Les objectifs de réduction exigés par le décret tertiaire sont ambitieux et vont nécessiter des propriétaires et des locataires une analyse fine des données de consommation pour identifier notamment les sites où il sera impossible de tenir les 40% de réduction à horizon 2030. Pour se faire, il sera possible de moduler l’objectif, à savoir adapter l’objectif de réduction en justifiant à l’aide d’un dossier technique les réductions possibles dans le délai donné et avec un investissement raisonné.
 
Ces modulations sont possibles dans un délai de 5 ans à compter de la date du premier dépôt sur la plateforme de recueil des données gérés par l’ADEME : la plateforme OPERAT. Les maîtres d’ouvrage ont donc jusqu’à 2026 pour lancer les études et identifier les plans d’action à mettre en œuvre pour atteindre des objectifs repensés.

 

 

OPERAT : la plateforme incontournable, créée spécifiquement pour déposer ses informations dans le cadre du décret tertiaire

 

L’arrêté du 10 avril 2020 présente la plateforme OPERAT et les différentes fonctionnalités qui vont être déployées pour que les utilisateurs puissent renseigner et être informés des objectifs et du reste à faire pour satisfaire les exigences du décret. Outre les aspects liés aux profils et leurs droits, la plateforme OPERAT réalisera les différents calculs automatiquement en ce qui concerne les consommations de référence relative et absolue, ainsi que les modulations en fonction des variations climatiques et en fonction des variations d’usage. L’utilisateur pourra identifier facilement les sites où il doit travailler le plan d’action.
 
La plateforme générera une attestation numérique annuelle qui validera le dépôt des données. La plateforme OPERAT décernera également une notation aux différents sites : la note « Eco Energie Tertiaire » symbolisée par une feuille : grise pour les bâtiments en surconsommation, jaune pour les bâtiments qui sont trop éloignés de la cible annuelle de réduction et vert (avec 1, 2 ou 3 feuilles) pour les sites qui sont proches de la cible, voire qui sont bien meilleurs ou déjà à l’objectif. Dès lors, c’est une vision d’ensemble qui est permise, permettant de répondre au mieux aux obligations du décret tertiaire.
 

Performance énergétique d’un parc : compenser les mauvais élèves par les bons

 

Enfin, pour les maîtres d’ouvrage qui gèrent des parcs immobiliers, on apprend que la plateforme OPERAT permettra de mutualiser les résultats au niveau du parc, en réallouant les écarts positifs (les sites qui ont dépassés l’objectif de réduction) aux sites qui sont en écarts négatifs. La plateforme OPERAT identifiera automatiquement les sites qui resteront en écarts négatifs sur lesquels le maître d’ouvrage devra apporter des modulations d’objectifs ou un plan d’action ambitieux pour satisfaire les exigences de réduction. Ainsi, satisfaire les exigences du décret tertiaire, s’avère être une tâche réalisable pour tous parcs immobiliers.

 

Décret tertiaire : des questions encore en suspens, qui n’empêchent pas de débuter la collecte des données et le travail d’analyse

 

À la lecture de l’arrêté, il reste toujours une inconnue importante pour identifier les sites sur lesquels travailler : les consommations de référence absolues par secteur. En effet, ces ratios de consommations sont en cours de discussion au sein de groupe de travail thématique et sectoriel et devront être compléter dans les prochains mois dans un nouvel arrêté « tertiaire II ».
 
En attendant, il est urgent pour les maîtres d’ouvrage de débuter le travail de collecte des données et de travailler les premières analyses de performance sur leur patrimoine pour répondre à la première échéance fixée par le décret tertiaire, à savoir : le dépôt des données d’entrée sur OPERAT pour la fin du mois de septembre 2022.

 

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